
28 février 2025
Patrimoine culture et la défense des intérêts with DAWN Canada Director of Black Community Initiatives, Tamara Angeline Medford-Williams, GrDIP, MSW
En tant que femme originaire des Caraïbes, éducatrice, militante et proche aidante, mon parcours a été profondément façonné par mes origines, mes expériences de vie et les sacrifices consentis au fil du temps par celles et ceux qui m’ont précédée. Ma lignée barbadienne remonte à la révolte des esclaves de 1816 à la Barbade – une lutte pour la liberté, la justice et la dignité qui est ancrée dans mes os et qui résonne dans tout mon être. Cette résilience et cette détermination, transmises de génération en génération, m’ont guidée à travers les complexités de l’intersectionnalité qui imprègnent mon travail.
Mon chemin a été pavé par le courage de celles et ceux qui n’ont pas cessé de se battre pour notre libération collective, depuis la rébellion de 1816 jusqu’au mouvement des étudiants noirs à l’Université Concordia dans les années 1960. En tant qu’éducatrice et professeure d’université à temps partiel, je me hausse jusque sur les épaules des géants – ces activistes, ces dirigeants et ces membres de la communauté noire qui ont réclamé la justice et refusé d’être réduits au silence. Ils m’ont transmis leur résilience et je maintiens leur héritage. Il ne suffit pas d’honorer leurs sacrifices. Il est temps de s’en inspirer, de se replier sur soi-même et de renforcer nos communautés de l’intérieur.
Mes racines jamaïcaines et barbadiennes m’ont inculqué l’importance de la communauté et de la responsabilité collective. Dans notre culture, le dicton « Il faut un village pour élever un enfant » reflète un principe qui va bien au delà de l’enfance. Il suppose de créer des réseaux de soins qui soutiennent tout le monde, particulièrement celles et ceux qui sont souvent négligés, oubliés, comme les femmes et les personnes de diverses identités de genre noires, africaines et caribéennes en situation de handicap. Cette perspective façonne mes activités de plaidoyer, lesquelles doivent favoriser des communautés et des systèmes inclusifs, accessibles et équitables.
Je m’inspire également de l’Ubuntu, une philosophie d’Afrique australe qui signifie « Je suis parce que nous sommes ». L’Ubuntu met l’accent sur l’interconnexion de l’humanité et sur la conviction que nul ne peut véritablement s’épanouir si les autres ne s’épanouissent pas aussi. Ce concept remet en question l’état d’esprit individualiste qui caractérise souvent les mouvements eurocentriques et appelle au contraire à une approche holistique, centrée sur les besoins et les expériences des personnes les plus marginalisées. Pour moi, l’Ubuntu est un appel à l’action – celle de construire des ponts, de favoriser la collaboration et de veiller à ce que personne ne soit laissé pour compte.
Cette philosophie m’est devenue très personnelle. Mes propres expériences de traumatisme complexe, de violence fondée sur le sexe et de diagnostics de trouble bipolaire, de trouble anxieux généralisé, de dépression et de douleur chronique m’ont appris à naviguer dans un monde qui oblige souvent les personnes noires à cacher leurs handicaps et leurs problèmes de santé physique et mentale afin d’être considérées comme des « êtres suffisants ». Mes expériences me rappellent l’importance de la compassion et de l’accessibilité et renforcent ma détermination à concevoir des environnements où les gens se sentent soutenus, valorisés et considérés dans leur pleine humanité.
Pour moi, « la défense de nos intérêts » n’est pas qu’une question de politiques ou de programmes; c’est d’abord un enjeu centré sur les personnes. Il importe de veiller à ce que chaque personne, quelle que soit son identité ou sa situation, ait la possibilité de vivre dans la dignité, obtienne l’accessibilité aux soins, vive dans l’appartenance à la société et soit entourée d’amour.
En tant que femme noire des Caraïbes au Canada, j’ai été confrontée à des obstacles systémiques enracinés dans le racisme, le sexisme et le capacitisme. Ces obstacles amènent la sous estimation de soi, la marginalisation et l’exclusion du leadership et des discussions essentielles. Trop souvent, les personnes noires sont célébrées pour leurs dons sans jamais être pleinement valorisées ou soutenues. Nous n’accepterons plus d’être réduites à l’état de symboles ou d’être exploitées. Il est temps de se replier sur soi pour mieux grandir, de construire notre communauté et de célébrer nos contributions à la société à nos propres conditions.
L’intersectionnalité en action
L’intersectionnalité n’est pas seulement un concept ou un mot à la mode; c’est une réalité qui façonne tous les aspects de mon travail. Chez DAWN Canada, nous reconnaissons que les expériences des femmes et des personnes de diverses identités de genre noires, africaines et caribéennes ne peuvent être séparées des systèmes d’oppression plus larges auxquels elles sont confrontées. Que ce soit par le biais de l’élaboration de politiques, d’initiatives de renforcement des communautés ou d’activités de sensibilisation, nous devons nous employer à faire en sorte que notre travail reflète la nature interconnectée de ces identités.
Bien que des progrès aient été accomplis, le travail est loin d’être terminé. La communauté noire en situation de handicap se trouve à l’intersection de multiples formes de marginalisation – le racisme, le capacitisme et la discrimination fondée sur le sexe. Ces systèmes d’oppression se chevauchent et créent des défis uniques qui requièrent des solutions concrètes.
Cette série visait à mettre en lumière les personnes qui s’emploient activement à changer les choses et celles qui ont une expérience vécue de la complexité de l’identité noire, tant au sein de notre personnel que parmi les personnes avec lesquelles nous collaborons. Bien que le Mois de l’histoire des Noirs mette souvent l’accent sur des personnages historiques, il est tout aussi important de reconnaître les personnes de notre entourage qui travaillent sans relâche, le plus souvent dans l’ombre. Elles méritent que nous leur rendions hommage.
Jetons un regard vers l’avenir. Notre travail doit reposer sur la résilience, les soins collectifs et l’autonomisation des communautés. Nous devons honorer les sacrifices de celles et ceux qui nous ont précédés en nous appuyant sur notre patrimoine et en concevant des espaces où les communautés noires, avec leurs complexités et leurs identités croisées, peuvent s’épanouir sans entraves.
Chez DAWN Canada, nous ne démordons pas de ces objectifs. La lutte, la résilience et la détermination de mes ancêtres me rappellent que le changement est plus que possible; il est inévitable. Il nous appartient de travailler de concert avec conviction, d’honorer l’héritage de force et de courage qu’ils nous ont légué en élaborant des solutions, en créant de nouvelles occasions de changement et en veillant à ce que personne ne soit laissé pour compte. Ensemble, nous pouvons façonner un avenir fondé sur l’équité, la dignité et l’appartenance pour toutes et tous.